Sally Rooney

Où es-tu, monde admirable ?

  • Éditions de L'Olivier - 381 pages - 23,50€

Alice et Eileen ont presque 30 ans et sont amies depuis la fac. La première est une autrice à succès très à l’aise financièrement, alors que la seconde vivote grâce à un boulot d’assistante dans un magazine littéraire. Eloignée géographiquement l’une de l’autre, elles entretiennent une intense correspondance. Leurs échanges témoignent non seulement de leurs préoccupations du quotidien mais surtout de leur regard sur le monde. Avec un humour qui peine à dissiper le profond désespoir de cette génération, l’amour, le sexe, l’argent, l’amitié, la politique sont autant de sujets passés au crible de leur analyse.

Comment s’aimer alors que le monde court à sa perte, comment construire quand on sait que les fondations ne tiennent que sur du sable.

Sally Rooney aborde nombre de sujets qui animent et questionnent au-delà de notre société contemporaine, les générations des moins de 30 ans pour mieux comprendre leurs angoisses, leurs satisfactions et leurs rêves. Son écriture franche est inspirée, son sens de la mise en scène remarquable et ses scènes de sexe particulièrement réussies.

Certainement une des plus remarquables plumes de sa génération !

Lettre d’Alice à Eileen

« Qui dans ce monde peut compter sur moi pourquoi que ce soit ? Personne. Crois-moi, je me le reproche suffisamment mais il me semble que l’échec est collectif. Autrefois, à notre âge, les gens étaient mariés, ils avaient des enfants et vivaient des histoires d’amour. De nos jours, à trente ans, on est encore célibataires et on habite avec des colocs qu’on ne croise jamais. Le mariage traditionnel n’était évidemment pas parfait et presque toujours voué à l’échec d’une manière ou d’une autre mais, au moins, on se battait pour quelque chose, pas pour une dépossession triste et stérile de la possibilité de la vie. »

Réponse d’Eileen à Alice

« Depuis quelques jours, je réfléchis aux derniers paragraphes de ton précédent mail afin d’essayer de déterminer si, comme tu le dis, « l’échec est collectif ». Je sais que toi et moi, on s’accorde sur le fait que la civilisation est entrée dans une phase de décadence, et que la laideur est la caractéristique visuelle prédominante de la vie moderne. Les voitures sont laides, les bâtiments sont laids, les biens de consommation jetables produits en masse sont d’une laideur indescriptible. L’air qu’on respire est pollué, l’eau qu’on boit est bourrée de microplastiques et nos aliments contaminés par du Teflon cancérigène. Notre qualité de vie décline, et avec elle, la qualité de l’expérience esthétique. […] Plus jeunes on imaginait que notre responsabilité s’étendait à toute la terre et ce qui y vit. Maintenant, il faut se contenter de ne pas décevoir ses proches, de ne pas utiliser trop de plastique et dans ton cas, d’écrire un livre intéressant tous les deux, trois ans. Jusque-là, tout va bien. A propos, travailles-tu déjà à un nouveau roman ? »

Julie

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